Cour de cassation, 3ème chambre civile, arrêt du 8 février 2024, RG n°22-17.620

📜 La Cour de cassation a rendu un arrêt le 8 février 2024 dans lequel elle précise que la crise sanitaire n’a pas pour effet d’exonérer le locataire du paiement des loyers malgré l’existence d’une clause de suspension de versement des loyers en cas de survenance de circonstances exceptionnelles et graves affectant le bien.

Dans le cas d’espèce, la société locataire a informé ses bailleurs de sa décision de suspendre le paiement des loyers des deuxième et troisième trimestres 2020 en raison de la crise sanitaire.

Il est précisé qu’il s’agit ici d’une résidence de tourisme dont l’activité a cessé au début de l’épidémie puis qui a enregistré un taux d’occupation en forte diminution avant une nouvelle fermeture décidée par le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020.

Les bailleurs ont assigné en référé la locataire en paiement de provisions correspondant à l’arriéré locatif.

La locataire estimait toutefois qu’il existait une contestation sérieuse du fait de la clause de suspension du versement des loyers qui stipulait à l’article « dispositions diverses » que « Dans le cas où la non sous-location du bien résulterait soit de la survenance de circonstances exceptionnelles et graves (telles qu’incendie de l’immeuble, etc) affectant le bien et ne permettant pas une occupation effective et normale, après la date de livraison, le loyer, défini ci-avant, ne sera pas payé jusqu’au mois suivant la fin du trouble de jouissance ».

La preneuse soulevait ainsi l’incompétence du juge des référés dans la mesure où ce dernier n’a pas le pouvoir d’interpréter cette clause.

La cour d’appel a néanmoins retenu que ladite clause était suffisamment claire et ne nécessitait pas d’interprétation dans la mesure où les circonstances exceptionnelles visées devaient affecter « le bien lui-même », c’est-à-dire « les biens loués eux-mêmes », soit l’immeuble ou bâtiment, entendu stricto sensu.

La Haute juridiction a rejeté le pourvoi formé par les bailleurs au motif que la clause de suspension du loyer prévue au bail impliquait que le bien lui-même soit affecté ce qui n’était pas le cas en l’espèce. En effet, la Cour de cassation insiste sur le fait que les mesures prises pour lutter contre la crise sanitaire avaient affecté, non les biens loués eux-mêmes, mais leurs seules conditions d’exploitation.

🔍Par une lecture a contrario de cet arrêt, il est raisonnable de penser qu’une clause de suspension de versement des loyers en cas de circonstances exceptionnelles affectant les conditions d’exploitation du bien (et non le bien lui-même) aurait permis au locataire d’échapper à une condamnation.

L’arrêt est disponible via le lien suivant : https://www.courdecassation.fr/en/decision/65c47d8686d70a000846ccf2

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