CASS – Civ 3ème – 11 juillet 2024 – RG n°23-15.325
📜Dans un arrêt du 11 juillet 2024 dernier, le litige concernait l’articulation entre une clause instaurant un droit de préférence au bénéfice du bailleur dans le cadre d’un bail à construction (BEFA) et une seconde clause aux termes de laquelle le bailleur s’engage à accorder à la preneuse un contrat de location à l’expiration du BEFA.
Se posait donc la question de savoir si la bailleresse pouvait légitimement user de son droit de préférence et mettre ainsi un terme au BEFA sans octroyer de bail commercial à la preneuse ?
⚖️En l’espèce, la Société immobilière et financière euro méditerranéenne (la bailleresse), propriétaire d’un terrain, l’a donné à bail à construction à la société KFC France (la preneuse) pour la construction d’un bâtiment à usage de restaurant.
Cet acte instaure un droit de préférence au profit de la bailleresse en cas de cession par la preneuse de son droit au bail et stipule que la bailleresse s’engage à l’expiration du bail par arrivée du terme ou résiliation amiable à accorder à la preneuse un contrat de location.
Soutenant avoir régulièrement exercé son droit de préférence sur la cession du bail à construction, la bailleresse a assigné la preneuse en régularisation de la cession et en obtention de dommages-intérêts.
La preneuse a demandé reconventionnellement le bénéfice de la promesse de bail commercial.
🔍 Tant le juge du fond que la Cour d’appel ont condamné la bailleresse à exécuter la promesse de bail commercial stipulée au bail à construction.
La bailleresse estime toutefois que « du fait de la cession intervenue par la mise en jeu du droit de préférence de la SIFER, celle-ci est devenue preneur, cumulant cette qualité avec celle de bailleur, mettant par suite fin au contrat de bail à construction, selon une hypothèse non expressément envisagée par le contrat de bail à construction, mais pas exclue non plus ». Elle estime ainsi que la clause litigieuse n’engageait la SIFER dans les termes d’une promesse de bail que dans les cas d’arrivée du terme ou d’une résiliation amiable, hypothèses auxquelles ne pouvait correspondre la confusion en la personne du bailleur des qualités de preneur et de bailleur.
La Cour de cassation rejette toutefois son pourvoi au motif que c’est par une interprétation souveraine de la commune intention des parties, exclusive de dénaturation, que l’ambiguïté des clauses du bail à construction rendait nécessaire, que la cour d’appel a retenu que la bailleresse était engagée par la promesse de bail en cas de confusion en sa personne des qualités de preneur et de bailleur.
Le contrat de bail à construction aurait dû ainsi stipuler expressément qu’en cas de mise en jeu du droit de préférence de la bailleresse, cette dernière était exonérée à l’expiration de la convention locative ou en cas de résiliation amiable de donner à la preneuse un contrat de location.
Arrêt disponible sur le lien suivant : https://www.courdecassation.fr/decision/668f76319b65e642c58783de?search_api_fulltext=bail+commercial&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&op=Rechercher+sur+judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=1&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=3