CA PARIS – 20 mars 2025 – 24-13681
📜 La Cour d’appel de PARIS rappelle, entre autres, dans son arrêt rendu le 20 mars dernier l’assiette restrictive sur laquelle doit porter la saisie-conservatoire en cas de loyer impayés.
L’article L. 511-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose qu’une autorisation préalable du juge n’est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut du défaut de paiement d’un loyer resté impayé dès lors qu’il résulte d’un contrat écrit de louage d’immeubles.
Or, les conditions sont strictes, l’article L 511-1 alinéa 1er du même code précise qu’une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur est possible sous réserve de justifier de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.
Enfin, l’article L511-4 du même code prévoit qu’à peine de caducité de la mesure conservatoire, le créancier doit engager ou poursuivre une procédure permettant d’obtenir un titre exécutoire s’il n’en possède pas.
Si les conditions prévues pour pratiquer une saisie conservatoire ne sont pas réunies, la mainlevée de la mesure conservatoire peut être ordonnée à tout moment (article R512-1), précision étant faite qu’il incombe au créancier de prouver que les conditions requises sont réunies.
📌 Suite à des difficultés économiques, le locataire à bail d’un centre commercial a donné congé du bail commercial dont il était titulaire. Plusieurs saisies ont été diligentées. L’une d’elles a été pratiquée pour garantie de la somme de 322.054,54 euros TTC dont il n’est pas contesté qu’elle englobe des pénalités, indemnités et intérêts.
A titre liminaire, il n’est pas inintéressant de préciser qu’une exception de litispidence avait été soulevée (soit le cas dans lequel deux juridictions également compétentes sont saisies d’un litige identique) dans la mesure où une procédure a été intentée devant le Juge de l’exécution pour ordonner la main-levée de la saisie diligentée et une seconde devant le tribunal judiciaire de Versailles. Le juge de l’exécution, confirmé par le juge d’appel, a considéré que les deux juridictions n’étaient pas saisies du même litige, la seconde ayant trait à la violation des obligations contractuelles respectives des parties dans l’exécution du contrat de bail et de leurs conséquences financières et indemnitaires, tandis que le juge de l’exécution est saisi de la contestation de la saisie-conservatoire, contestation relevant de la compétence exclusive du juge de l’exécution ne pouvant être renvoyée au tribunal judiciaire de Versailles.
Surtout, la Cour d’appel confirme le jugement rendu par le juge de l’exécution ayant ordonné la main-levée car lorsqu’il agit en vertu d’un contrat de bail écrit, le défaut de paiement doit concerner des loyers et charges, toutes autres sommes, quand bien même elles seraient dues en vertu des dispositions contractuelles du contrat de bail. Autrement dit, impossible de se prévaloir de l’article 511-2 précité qui vise exclusivement le « loyer » (ce qui englobe les charges d’après la Cour même si le texte ne le précise pas) étant exclues du bénéfice de cette disposition.
La saisie-conservatoire est donc à manier avec prudence, d’autant plus que des dommages-intérêts peuvent en outre être alloués au débiteur. Dans le cas d’espèce, la Cour d’appel a condamné le propriétaire bailleur à verser la somme de 4.000 € à ce titre en raison du préjudice d’immobilisation de trésorerie.
Lien vers la décision commentée : https://www.courdecassation.fr/decision/67dd040317277cb12b43d7fb?search_api_fulltext=bail%20commercial&op=Rechercher&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=all&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=8&nextdecisionpage=1&nextdecisionindex=0