CA Bordeaux – 11 juillet 2024 – RG n°24/00102
📜Dans cet arrêt, la Cour d’appel de Bordeaux rappelle le caractère cumulatif des conditions nécessaires aux fins d’obtenir la suspension de l’exécution provisoire d’une décision ayant ordonné l’expulsion d’une société locataire du fait d’impayés.
⚖️En l’espèce, la preneuse payait irrégulièrement ses loyers. Malgré des mises en demeure et commandements de payer, la dette n’a toutefois pas été apurée.
Pour cette raison, le bailleur l’a assigné puis a obtenu la résiliation judiciaire du bail par jugement en date du 30 mai 2024.
La société preneuse a interjetté appel puis a ensuite saisi le premier président aux fins d’obtenir l’arrêt de l’exécution provisoire et ainsi tenter d’obtenir un sursis jusqu’à ce que la Cour d’appel se prononce sur le fond.
🔍 Le premier président rappelle à titre liminaire que selon l’article 514-3 du code de procédure civile, il a le pouvoir d’arrêter l’exécution provisoire de la décision uniquement lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
Il ajoute ensuite que :
- la demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation – le moyen sérieux de formation étant entendu comme un moyen qui, compte tenu de son caractère pertinent, sera nécessairement pris en compte par la juridiction d’appel avec des chances suffisamment raisonnables de succès – l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
- le risque de conséquences manifestement excessives doit être apprécié au regard des facultés de paiement du débiteur ou des facultés de remboursement du créancier, ces deux critères étant alternatifs et il suppose la perspective d’un préjudice irréparable et d’une situation irréversible en cas d’infirmation.
En l’espèce,le premier président estime que la répétition des retards de paiement était un manquement suffisamment grave justifiant la résiliation du bail car :
- la bailleresse avait été mise en difficulté économique par le paiement systématiquement irrégulier des loyers durant trois années consécutives
- la locataire n’a apporté aucune preuve comptable fiable démontrant ses difficultés économiques, alors même que la bailleresse lui avait permis d’aménager sa dette de loyer au cours de la crise sanitaire.
Cet arrêt est on ne peut plus classique en la matière mais a le mérite de rappeler qu’à défaut de démontrer l’existence d’un moyen sérieux de réformation ou d’annulation de la décision, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire sera nécessairement rejetée sans qu’il soit nécessaire d’analyser les conséquences manifestement excessives qu’entraînerait l’exécution de la décision dont appel.
En effet, pour prétendre à l’arrêt de l’exécution provisoire, les conditions susmentionnées sont cumulatives.
Arrêt disponible sur le lien suivant: https://www.courdecassation.fr/en/decision/6690c73b0d808eb34e4554be